Lettre ouverte d’OFG Recherche à Carlos Ghosn
Cher Carlos Ghosn,
Ce n’était pas forcément consensuel, mais le conseil de Renault (que vous présidez) vient de vous renouveler dans un dernier mandat de PDG qui prendra fin en 2022. Alors, le compte à rebours a commencé et avec lui la recherche de votre successeur.
En tant qu’actionnaire minoritaire de Renault, je m’interroge : comment fait-on pour dénicher cet oiseau rare qui pourra vous succéder, vous qui êtes l’Alpha et l’Omega de ce groupe, son principe et sa fin… Un principe posé en 2002, alors que vous étiez déjà PDG de Nissan, qui doit pouvoir permettre d’appréhender une fin en 2022, année de votre départ.
En 2022, l’Alliance, votre fille aura 20 ans. Comme le temps passe vite… A 20 ans on quitte son père et sa mère… Son père dans ce cas précis. Et c’est bien d’une histoire de famille qu’il s’agit, une famille dont l’arbre généalogique aurait poussé à l’envers. Mais peut-être que le Japon a un pied dans l’hémisphère sud…?
Nous, à Paris, on a tendance à penser que Renault SA est la mère de Nissan car elle en détient 43%. Logique… mais ce n’est pas du tout comme ça que vous l’entendez. Pour vous Renault est éventuellement la sœur de Nissan mais certainement pas sa mère. Et c’est à côté de Nissan que vous avez placé le constructeur français Renault SAS dans l’organigramme. Quand l’Etat français, premier actionnaire de Renault, vous chauffe un peu les oreilles, vous menacez même de faire de Renault, la fille de Nissan… Compliqué tout ça, mais cette boucle d’autocontrôle que vous avez mise en place en 2002 vous permet d’être tour à tour dirigeant ou actionnaire.
Pour calmer les irritations d’un actionnaire qui pourrait se sentir dessaisi de son pouvoir sur Nissan, vous avez un solide argument. Aligato Monsieur Ghosn… merci pour les 6 milliards € que Nissan a versés depuis 15 ans à Renault et qui ont permis de financer l’intégralité des dividendes que Renault a lui-même versé à ses actionnaires. On ne peut pas en dire autant des français, plutôt cigales…
Un autre argument permet de refuser toute ingérence de Renault dans Nissan : pas de contrôle pas d’ingérence ! Nissan n’est même pas consolidée dans les comptes de Renault. C’est un peu fort de café quand la mère et la fille sont dirigées par une même personne : vous en l’occurence ! Vous êtes décidément très très fort…
En 2022, l’Alliance quittera son père, et puisque vous quitterez l’Alliance, Renault et Nissan verront partir leur grand-père…
Quel chemin parcouru ! Vous aurez réussi votre pari de faire de ce groupe (je n’ose plus écrire de Renault) le premier constructeur mondial. Pour aller vite, vous avez statutairement transféré les pouvoirs des deux constructeurs au sein de RNBV, le centre névralgique basé à Amsterdam où se décide la stratégie, où se partage le monde et où se répartissent les synergies. Mais où l’actionnaire n’a pas voix au chapitre. Encore lui…
Voilà pour les principes, reste à imaginer la fin. Une fin qui pourrait satisfaire chacune des parties prenantes et redonner sa place à l’actionnaire.
Thierry Bolloré numéro 2 ? De Renault oui, il est Directeur général délégué, mais certainement pas de l’Alliance. Il n’est pas né celui qui pourra vous succéder dans cette construction. La suite de l’histoire ne sera sans doute pas une seule histoire d’hommes, elle devra trouver son équilibre dans de nouvelles fondations juridiques.
Alors merci et bravo ! Mais si vous êtes la somme des parties de ce beau groupe, vous en êtes aussi sa décote. Alors s’il vous plaît Carlos Ghosn, redonnez sa place à l’actionnaire pour lui permettre de reprendre son pouvoir chez RNBV, chez Renault SAS, chez Nissan et chez Renault SA.
Une belle cerise sur le gâteau d’anniversaire.
Très cordialement,
Signée
Olivia Flahault et Frédéric Genevrier, co-fondateurs d’OFG
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