Si ce n’est pas un « parachute doré », ça y ressemble beaucoup. Arrivé chez Alcatel-Lucent comme directeur général, en avril 2013, Michel Combes vient de quitter son posteavec un pactole de l’ordre de 13 millions €. Il devrait toucher cette somme dont une bonne partie en actions, à condition que la vente du groupe à Nokia intervienne comme prévu. (Attention certains chiffres ont été modifiés par une décision du 29 juillet 2015 voir notre nouveau calcul en fin d’article ainsi que le point précis indiqué à l’occasion de l’AG d’Alcatel-Lucent du 13 septembre 2016 )
Ce patron-éclair qui devrait rejoindre son ami Patrick Drahi chez Altice n’a pas droit à des indemnités de départ puisqu’il démissionne, mais son conseil lui a octroyé des compensations bien plus lucratives.
Il gardera le bénéfice de ses primes à long terme de 2013 et 2014, car les conditions de présence à moyen terme dans l’entreprise ont été supprimées la veille de l’annonce de la signature de l’accord de vente d’Alcatel-Lucent à Nokia.
Ce même 14 avril 2015, Michel Combes a également, obtenu l’effacement des conditions de performance pour sa prime à long terme octroyée en mars 2015 ainsi que l’attribution d’actions gratuites.
Ces deux dernières gratifications pourraient atteindre et même dépasser 3,6 millions €. Elles sont liées à la vente de Nokia puisqu’elles ne seront acquises que si le deal est bouclé dans les conditions décidées par le conseil. Des conditions, rappelons-le qui ont été contestées lors de l’assemblée générale du 26 mai par des activistes et des actionnaires individuels.
Le DG aura droit en outre, à une retraite chapeau que nous détaillons ci-dessous.
Il doit ces largesses à la bonne volonté de Philippe Camus, ancien patron d’Airbus devenu président d’Alcatel-Lucent en 2008 et Jean-Cyril Spinetta, ancien patron d’Air France et d’Areva, actuellement président du comité des rémunérations du groupe franco-américain. C’est le même Philippe Camus qui le remplace à la direction générale le 1er septembre prochain.
Au total, en moins de trois ans, Michel Combes qui plie bagage après avoir revampé l’entreprise et négocié sa vente à Nokia aura engrangé plus de 16 millions € de rémunérations en tous genres.
Voici, ci-après le détail de ce qui l’attend :
Rémunérations fixe + variable : 1,4 million €
Michel Combes devrait quitter son poste de DG d’Alcatel-Lucent sous peu. S’il part en juillet, nous avons calculé qu’en 2015, il pourrait percevoir au titre de sa rémunération fixe et variable, un minimum de 1,4 million € (fixe 2015+variable 2014), voire plus s’il parvient à se faire verser au titre de 2015, un bonus pouvant aller jusqu’à 2,4 millions € supplémentaires.
Pour mémoire, il a déjà perçu 3 millions € de rémunérations fixes et variables en 2013 et 2014.
Actions gratuites : 1,3 million €
Le conseil d’Alcatel-Lucent s’était soit-disant engagé à attribuer au DG, 700.000 stock-options au titre de l’exercice 2014. Or, ces stock-options – dont nous n’avons pas réussi à retrouver la trace – n’ont pas été distribuées. Ce qui n’a pas empêché le conseil, de décider la veille de la signature de l’accord avec Nokia, que « compte tenu des circonstances très particulières que constitue l’opération de rapprochement envisagée », ces stock-options seraient converties en actions gratuites.
Le détail des conditions d’octroi des stock-options fantômes n’est pas divulgué, le prix d’attribution restant inconnu. Le conseil a toutefois précisé que le calcul de leur transformation en actions gratuites tiendrait compte du cours de référence d’Alcatel-Lucent retenu pour établir la parité avec Nokia soit 4,48 €. Ce cours a été atteint le 14 avril après une hausse de 24 % en l’espace d’une semaine, pour retomber ensuite à son niveau antérieur. Ce qui mériterait quelques explications, voire une enquête de l’AMF, puisque l’information sur la parité n’était pas encore rendue publique.
Quoiqu’il en soit, les actions gratuites Alcatel-Lucent attribuées à la place des stock-options, seront libérées d’ici 2018. Leur nombre sera plafonné à 375 000. Evaluées en prenant a minima le cours actuel de l’action (3,40 €), elles peuvent-être estimées à 1,3 million €. Voilà qui ressemble fort à une prime de départ payée en action.
Plan de rémunération à long terme : 8,9 millions €
Suivront, des rémunérations variables à long terme dont le paiement est étalé sur plusieurs années. Le comité des rémunérations composé d’administrateurs d’Alcatel-Lucent dits indépendants, a accepté l’attribution à Michel Combes de primes confortables en 2013, en 2014 et même en mars 2015 cinq semaines avant la signature de l’accord avec Nokia.
Ces primes baptisées « unités de perfomance » étaient soumises à des conditions de présence dans l’entreprise dans les trois années qui suivaient. Elles étaient liées à la réalisation de certains objectifs (réduction des coûts et des effectifs, cessions d’actifs, réduction de l’endettement et évolution du cours de Bourse…). Or, faisant preuve de largesse, le conseil d’administration d’Alcatel-Lucent, a accepté le 14 avril dernier, à la veille de la signature de l’accord avec Nokia, de revoir les conditions d’octroi de ces primes. Ainsi, la condition de présence (jusqu’en 2018) a été gommée et remplacée par une présence « trois mois après la signature de l’accord avec Nokia » c’est à dire jusqu’au 15 juillet prochain. Il est aussi précisé que l’OPE de Nokia devra être menée à bonne fin dans les conditions prévues.
La prime de 2015 a été « accélérée ». Ce qui signifie que les conditions de performance liées ont été supprimées. Elle pourrait donc s’analyser, elle aussi, comme une indemnité de départ.
Ces « unités de performances » ne seront toutefois débloquées qu’en 2016, 2017 et 2018 et versées en actions Alcatel-Lucent, échangées d’ici là contre des actions Nokia, a précisé le conseil.
Michel Combes touchera ainsi :
1 245 832 actions Alcatel-Lucent au plus tôt le 1er avril 2016 (échangeables contre des actions Nokia)
679 616 actions Alcatel-Lucent le 19 mars 2017 (échangées contre des Nokia selon la parité de l’OPE)
685 000 actions Alcatel-Lucent le 13 mars 2018 (échangées contre des Nokia selon la parité de l’OPE).
Au total, le DG qui n’aura pas à gérer les conséquences de la fusion se voit tout de même gratifié de près de 8,9 millions € de primes payables en actions (sur la base du cours de 3,40 €).
Retraite chapeau Alcatel : 1,3 million €
Michel Combes va bénéficier d’un régime de retraite supplémentaire (AUXAD) assez exceptionnel. Le contrat a été réaménagé en 2013. Le bénéficiaire devra avoir accompli une certaine performance mais il n’est pas obligé de terminer sa carrière dans l’entreprise pour toucher la rente lorsqu’il liquidera ses droits à la retraite.
Le DG pourra, en principe, quitter Alcatel-Lucent avec la promesse d’une rente annuelle dont le montant dépendra de sa dernière rémunération fixe et variable en année pleine chez Alcatel Lucent. D’après nos estimations, cette rente devrait se baser sur la rémunération de 2014 et s’élever à 80 000 €/an. Compte tenu de l’espérance de vie du DG, les versements peuvent être estimés à 1,3 million €.
Actualisation des chiffres au 1er septembre 2015: le pactole avoisine maintenant 16 millions € et non plus 13 M€
Nous remettons à jour le calcul du pactole de départ dont bénéficie Michel Combes compte tenu de la décision du conseil d’Alcatel Lucent du 29 juillet 2015 . Le total avoisine 16 millions € et non plus 13 millions €. Il tient compte de l’indemnité de non concurrence octroyée à cette date par le conseil, du plafonnement des actions gratuites et de la retraite chapeau. Nous prenons également en compte sa date de départ ajustée au 1er septembre ainsi que la baisse de 10 % du cours de l’action Alcatel-Lucent. Voici le nouveau décompte :
Rémunération fixe : 0,8 M€
Rémunération variable annuelle : 1,1 M€ (est. 70 % réalisé)
Actions gratuites : 1,1 M€ soit 350 000 x 3 €
Unités de performance 2013 : 3,7 M€ soit 1 245 832 x 3 €
Unités de performance 2014 : 2 M€ soit 679 616 x 3 €
Unités de performance 2015 : 2 M€ soit 685 000 x 3 €
Indemnité de non concurrence : 4,5 M€
Retraite chapeau : 0,8 M€ (plafonnée à 50 000 € annuel)
Retrouvez les documents liés aux attributions ici :
Décision du conseil en date du 5 février 2015
Fixe-2014 et variable-2015-MCombes-mar06-2015-vFR
Décision du conseil du 13 mars 2015
Unites-de-performance-2015-MCombes-mar20-2015
Décision du conseil en date du 14 avril 2015
Communication-MCombes-13mai2015-VFR
Décision du conseil en date du 29 juillet 2015 communiquée le 3 août 2015
Les indemnités de non concurrence de Combes
Actions gratuites, retraite chapeau au départ de Combes
Je partage votre avis. Son départ et le paquet d’actions qui va avec, mériteraient a minima, quelques explications de la part du conseil.
J’ai réécouté l’audition d’hier à l’Assemblée Nationale. Le repreneur Nokia s’intéresse surtout à la R&D d’Alcatel-Lucent et pas tellement aux effectifs. M.Combes a laissé entendre que les cadres eux-même, avaient demandé à ce qu’il n’y ait pas deux patrons comme dans le cas ( désastreux) d’Alcatel et de Lucent. De là à ce qu’il parte avant la fin de l’OPE!
L’opération est loin d’être terminée et il faut des salariés vaillants pour travailler dans ces conditions. La culture du groupe est-elle telle que ça ne pose aucun problème? Avez-vous des compléments d’information sur la question ?
Pour les salariés qui vont être éjectés dans deux ans et qui paieront la facture de la vente d’Alcatel-Lucent, c’est niet pas d’actions gratuites a dit Combes en audition à l’assemblée. Je n’ai pas compris son explication mais c’est comme ça.
Alors quand je lis ci-dessus que lui, il partira avec plusieurs millions d’actions qui lui ont été attribuées, je me dis que ce type doit être une sacrée pointure, qu’il vaut plus que nous tous réunis, et là je ne comprend pas pourquoi on le laisse partir ?
A moins qu’on lui donne ces actions pour qu’il parte ?