Des idées fraîches pour changer les relations entre l’entreprise et ses actionnaires, moderniser l’exercice de la démocratie actionnariale… les responsables de regroupements d’actionnaires n’en manquent pas. A l’heure du digital, ils n’entendent pas rester passifs.
Car depuis deux ans, dans le sillage de RegroupementPPLocal ou encore de l’APPAED (l’association des actionnaires d’Euro Disney ), les actionnaires individuels sont nombreux à se regrouper. Ils connaissent de mieux en mieux leurs droits et déplorent les barrières qui sont mises par les entreprises qui ont parfois du mal à suivre. Les forums de Boursorama créent des occasions de regroupement, des animateurs se détachent, ceux qui sont à l’aise avec le digital créent des plateformes de discussion, ceux qui aiment prendre la plume installent des blogs et rédigent des posts, ils écrivent à l’AMF, posent des questions écrites à l’assemblée générale, déposent des résolutions, contestent et vont même parfois en justice. Au final, les relations via internet sont devenues tellement fluides, avec la possibilité pour chacun de s’exprimer qu’ils acceptent difficilement, le manque d’explication, d’échange et de communication avec l’AMF et les émetteurs.
Internet est un outil formidable pour que s’exerce la démocratie actionnariale et les entreprises vont subir à court terme, de plus en plus de pression pour faire évoluer leurs relations avec l’actionnariat individuel. Les dirigeants de Theolia, de CGG, d’Hubwoo, de Sequana et de SoLocal en ont déjà fait l’expérience.
Alors que la loi PACTE ouvre une petite porte pour modifier le droit des sociétés et que la réglementation boursière n’a pas finit d’évoluer, trois animateurs de regroupements et d’associations, réunis à l’initiative de minoritaires.com ont listé des pistes de réforme qui leur tiennent à coeur.
Piste numéro 1 – Un nouveau mode de rémunération pour les dirigeants
Les actionnaires individuels sont sensibles aux écarts de rémunérations qui existent entre les salariés et les dirigeants tout en étant d’accord pour partager avec ces derniers les profits qui découlent d’une bonne conduite des affaires.
Ils proposent un système simple et incitateur applicable en priorité aux entreprises du SBF120. La rémunération du dirigeant serait composée d’un fixe annuel brut plafonné qui ne devrait pas dépasser 20 à 25 fois le salaire (moyen ou de base) de l’entreprise en question. Le reste de la rémunération serait versé en totalité en actions ou en stock-options, et ne serait débloqué qu’au bout de cinq ans, de façon à ce que cette rémunération variable soit alignée sur la performance du titre pour l’actionnaire.
Piste numéro 2 -Une majorité double pour voter des « résolutions sociétales »
Le vote des rémunérations des mandataires sociaux et des conventions réglementées concernant les retraites chapeau, indemnités de départ, indemnités de non concurrence… etc.. ferait l’objet de résolutions à part qui pourraient être qualifiées de « Résolutions sociétales ». Une majorité spéciale s’appliquerait à ces résolutions, à l’instar de ce qui se passe dans les assemblées générales de co-propriétaires. Pour être votées, les rémunérations devraient réunir par exemple, à la fois une majorité des deux tiers des voix des actionnaires ainsi qu’une majorité des voix des actionnaires présents ou représentés sur la base 1 actionnaire = 1 voix. Ce type de vote double pourrait s’appliquer à d’autres décisions relevant de la gouvernance ou de la RSE.
Piste numéro 3 – Un mécanisme inversé pour les droits de vote doubles
Le mécanisme actuel des droits de vote multiples recèle une abbération. Là où les droits de vote doubles existent, un actionnaire qui possède des actions au nominatif depuis deux ans va peser double sur le vote en AG et l’avenir de la société, alors même que rien ne l’empêche de vendre ses actions le lendemain matin.
Les représentants des actionnaires individuels consultés par minoritaires.com ne sont pas opposés aux droits de vote multiples mais souhaitent que le mécanisme soit inversé. Ainsi, seul un actionnaire qui s’engage à détenir un titre pendant deux ou trois ans, pourrait se prévaloir d’un droit de vote double en AG. Il se verrait par exemple remettre des actions de préférence bloquées et inscrites au nominatif. En cas d’offre publique, les actions de préférence feraient automatiquement l’objet d’une offre d’échange. Pour le reste, elles auraient les mêmes caractéristiques que les autres actions.
Piste numéro 4 – Le système Votaccess rendu obligatoire pour les AG
Les actionnaires, qui n’habitent pas sur place, ont du mal à se rendre en assemblée générale pour exercer leurs droits de vote et suivre les débats pourtant instructifs et formateurs. Or, l’utilisation d’internet permet aujourd’hui très facilement à tous les actionnaires de suivre la diffusion d’une assemblée générale, en ligne, a minima audio. Internet facilite non seulement le vote à distance mais aussi l’envoi de procurations, l’obtention des attestations nécessaires pour poser des questions à l’AG ou encore pour obtenir sa carte d’admission.
Toutes les entreprise cotées sur un marché réglementé devraient systématiquement proposer de telles solutions à leurs actionnaires, en attendant un véritable vote en ligne en direct. L’entreprise doit pouvoir soit utiliser une solution existante qui lui soit propre ( type Legal Tools), soit proposer la solution Votaccess à tous ses actionnaires mais elle ne doit prendre connaissance des votes à distance qu’une fois la séance ouverte.
De son côté Votaccess doit être en mesure de proposer aux entreprises un service à bas coût en réalisant des économies d’échelle, et en modulant ses tarifs pour tenir compte de la taille des entreprises. Tous les intermédiaires financiers et courtiers en ligne doivent adapter leur système pour proposer cette solution à leur clients actionnaires.
Ces pistes ont été évoquées par :
Gérard Nahas, Président de l’association Asamis ( actionnaires de Sequana) – site regroupement-actionnaires.com
Baudoin de Pimodan, animateur du regroupement SoLocal Ensemble – site solocalensemble.com
Robert LEBOT, co-animateur du regroupement des actionnaires de Hubwoo
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