Le fabricant de jeans Levi Strauss & Co a relevé ses objectifs pour l’exercice 2024-2025, mais l’ombre des droits de douane plane sur ses marges du dernier trimestre. Un avertissement qui a fait plonger le titre de 10% dès l’ouverture à Wall Street.
Cap sur la marque phare et abandon de Dockers
L’été dernier, Levi Strauss & Co publiait des résultats trimestriels qui battaient les prévisions et rehaussait ses objectifs annuels. Le groupe mise tout sur sa marque star Levi’s et se sépare de Dockers, cédée à Authentic Brands Group – le propriétaire de Reebok entre autres. Cette vente fait écho à un audit stratégique lancé en octobre 2024, Dockers perdant du terrain face à des consommateurs européens et américains qui lui tournent le dos.
Pour Zak Stambor, analyste chez eMarketer : « Dockers ne colle plus aux tendances depuis belle lurette ». Dans le même temps, Levi Strauss muscle ses ventes directes pour mieux contrôler ses marges et élargit sa palette produits. Direction : les femmes et le sportswear, avec notamment le rachat de Beyond Yoga en août 2021.
Troisième trimestre : la machine tourne
Cette pivot stratégique séduit. Le chiffre d’affaires du troisième trimestre (clos fin août) grimpe de 6% à 1,54 milliard de dollars. En données ajustées, l’augmentation atteint même 7%. Les ventes se répartissent entre les distributeurs (+5%) et les boutiques en propre (+9%).
Géographiquement, l’Asie sprinte à +12% après avoir stagné au trimestre passé. Les Amériques gagnent 7%, l’Europe 3%. Côté rentabilité, la marge brute progresse de 1,1 point sur un an et le résultat opérationnel ajusté (Ebit) s’élève à 182 millions de dollars. Le bénéfice net par action ressort à 0,34 dollar, battant le consensus de 0,31 dollar selon CNBC.
CNBC observe que « Levi’s surfe sur la vague du denim tout en diversifiant au-delà du jean, une stratégie qui lui permet de limiter son exposition aux caprices de la mode ». Mais dès le troisième trimestre, le groupe a ressenti les effets des droits de douane.
Les taxes douanières assombrissent le quatrième trimestre
Malgré cette belle performance, Levi Strauss & Co a revu ses ambitions à la hausse : croissance annuelle en données comparables portée à environ 3% contre 2% auparavant. Le bénéfice net par action est attendu entre 1,27 et 1,32 dollar, contre une fourchette antérieure de 1,25-1,30 dollar. Ces nouvelles cibles dépassent les attentes des analystes, qui prévoyaient initialement un repli de 2,9% des revenus en 2025, et s’alignent sur le consensus de Wall Street à 1,31 dollar par action.
Reste que Levi Strauss navigue en eaux troubles avec les mesures protectionnistes. L’entreprise subit toujours une taxe de 30% sur ses exportations chinoises et a doublé ses prévisions d’impact pour les autres marchés, passant de 10% à 20% au dernier trimestre.
Les équipes de Barclays jugent ces estimations conservatrices. Selon elles, Levi Strauss n’a détecté aucun changement dans les comportements d’achat des consommateurs ou détaillants en septembre concernant les prix. Le directeur financier Harmit Singh a confié à Reuters que ces droits de douane devraient amputer la marge brute du quatrième trimestre d’environ 130 points de base (1,3 point de pourcentage) – une période cruciale avec les achats de fin d’année.
D’où la chute immédiate de 10% du titre vendredi matin, même si l’année boursière reste brillante avec +40% depuis janvier. Bank of America garde le moral : gains de parts de marché, nouveaux partenaires distributeurs et marge brute au-dessus des attentes justifient de maintenir sa recommandation d’achat.

