Daniel Bouton et Société Générale ont perdu leur combat judiciaire contre minoritaires.com

La Société Générale et son ex-PDG Daniel Bouton avaient déposé en 2016, des plaintes en diffamation, tant contre les Inrocks que contre la directrice de publication de minoritaires.com, Marie-Jeanne Pasquette, comme ils l’avaient fait à l’encontre de Mediapart et de minoritaires.com, en 2015 et 2016. Le procès devait se tenir le 6 septembre 2019 devant la 17ème chambre correctionnelle du TGI de Paris, et visait sur les propos tenus dans l’article des Inrocks sur l’affaire Kerviel, intitulé « Société Générale, un bluff à 4,9 milliards ? » du 2 mars 2016. Le 11 juillet dernier, les parties civiles (Daniel Bouton et la Société Générale) ont finalement préféré se désister de cette instance.

Cette décision se situe dans le prolongement du procès jugé en décembre 2018 contre Mediapart et de minoritaires.com. Les plaignants Daniel Bouton et Société Générale avaient alors perdu leur combat judiciaire. Les journalistes et directeur de la publication de Mediapart et minoritaires.com avaient été relaxés.

Des procès pour baillônner la Presse

Comme pour d’autres sociétés et dirigeants qui attaquent les journalistes en diffamation, les plaignants tentent de bâillonner les autres médias et de dissuader les confrères de reprendre l’information. Certains de ceux qui ont trouvé l’information suffisamment intéressante et l’ont complété après nous avoir demandé les preuves, comme Mediapart et Les Inrocks, ont été exposés eux aussi, à des poursuites. Et ceci pour qu’au final, le juge estime lui aussi que nous avions les éléments qui nous permettaient de tenir les propos concernés sans manquer de prudence, et que les plaignants décident enfin de se désister des dernières instances.

Les détails du procès en diffamation de Daniel Bouton et Société Générale contre minoritaires.com et Mediapart

Le 29 septembre 2015, le site minoritaires.com publiait un article indiquant qu’à l’époque de l’affaire Kerviel, l’ex-PDG de la Société Générale, Daniel Bouton avait informé ses confrères dirigeants de banques concurrentes, des positions prises par le trader, et de leur débouclage imminent, ceci dès le soir du dimanche 20 janvier 2008, bien avant d’en informer les marchés le jeudi 24 janvier 2008. Les positions Kerviel dénouées laisseront au final 4,8 milliards € de pertes selon la Société Générale qui obtiendra ainsi un crédit d’impôt de 2,2 milliards € de la part de l’État français.

Minoritaires.com, dans l’article incriminé en question, s’estimait en mesure d’affirmer qu’en janvier 2008, le PDG de la banque avait menti lorsqu’il disait avoir assuré la confidentialité sur le débouclage des positions frauduleuses de Jérôme Kerviel. Le gouverneur de la Banque de France et le Président de l’Autorité des Marchés Financiers de l’époque avaient pourtant exigé la confidentialité sur cette information privilégiée.

En mars 2016, minoritaires.com n’avait reçu aucun démenti de ces informations. Dans son édition du 3 mars 2016, Mediapart avait alors repris et complété l’information de minoritaires.com dans un article intitulé « Affaire Kerviel: deux banquiers ont contredit la Société générale« , tandis que les Inrocks avaient également fait état des résultats de l’enquête de minoritaires.com parue cinq mois plus tôt dans un article intitulé « Société Générale, un bluff à 4,9 milliards ? » .

Dénonçant de fausses informations attentatoires à l’honneur et à la considération de Daniel Bouton et de la Société Générale, la banque et son ex-PDG, avaientdéposé de multiples plaintes en diffamation d’abord fin 2015 puis début 2016, contre la directrice de la publication de minoritaires.com, Marie-Jeanne Pasquette, d’une part, contre Mediapart et sa journaliste Martine Orange et contre les Inrocks et leur journaliste Basile Lemaire, d’autre part.

Maître Sobel a produit pour la défense, deux enregistrements audio de dirigeants de banque

Le procès contre minoritaires.com et sa directrice de la publication, s’est tenu le 19 octobre 2018 en même temps que le procès contre Mediapart, en présence de Daniel Bouton et avec la comparution comme témoin du Président du directoire de Natixis, Philippe Dupont. A l’appui des propos publiés par les journalistes de minoritaires.com et de Mediapart, deux enregistrements audio de dirigeants de banque, ont été produits par Maître Maud Sobel, avocate de minoritaires.com. Le procès a duré plus de 10 heures en présence de Me Emmanuel Tordjman et François de Cambiaire, avocats de Mediapart et de Me Jean Veil, François Martineau, Jean Reinhard, Jean-Yves Dupeux et Nicolas Besnoit qui assistaient les plaignants, Daniel Bouton ainsi que la Société Générale.

Sur les enregistrements en question, diffusés à l’audience, l’ex-président du directoire de Natixis, Philippe Dupont évoque sa conversation avec Daniel Bouton bien avant toute information publique sur les positions prises par Jérôme Kerviel et l’intérêt pour Daniel Bouton d’informer ses pairs avant le débouclage de celles-ci. Les enregistrements évoquent également le nom de collaborateurs chez Natixis et chez Crédit Agricole SA, qui étaient également informés à cette occasion.

Mediapart et minoritaires.com relaxés

Par jugements du 21 décembre 2018, les juges de la 17ème chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris, ont estimé que ces enregistrements ainsi que les documents produits par minoritaires.com, « constituaient une base factuelle suffisante pour tenir les propos incriminés sans manquer de prudence au regard de l’importance du sujet d’intérêt général exprimé ».
Les plaignants Daniel Bouton et Société Générale ont perdu leur procès. Ils ont d’abord annoncé qu’ils faisaient appel puis il y ont renoncé le 13 mars 2019.

NB : minoritaires.com s’inscrit en faux s’agissant de l’article publié par le quotidien Les Echos le 6 février 2019 intitulé « Affaire Kerviel : match nul entre Bouton et minoritaires.com »