Une veuve venue assister à l’assemblée générale de CGG le 13 novembre 2017, me raconte son histoire autour d’un café. Cette soixantenaire perd son mari, en 2013. Dans le portefeuille de celui-ci, elle trouve une très grosse ligne d’actions CGG qui, au moment du décès, cotent 300 euros. Mais la liquidation de la succession traîne en longueur, deux années au total, pendant lesquelles notre veuve est bien trop occupée pour surveiller le cours de CGG. De toutes façons, elle ne peut rien décider car, en attendant d’être partagés, les biens sont gelés.
Pendant ce temps, l’exploitation du gaz de schiste américain ralentie la demande de pétrole, un mauvais coup pour les actions du spécialiste de l’échographie du sous-sol. C’est une centaine de milliers d’euros d’épargne qui partent en fumée, pour la veuve et pour les héritiers. Quand elle récupère les actions de son époux, l’ex- Compagnie Générale de Géophysique vaut autour de 70 euros. Et 70 € par action c’est peu ou prou ce qu’elle paiera en droit de succession. Car le fisc se base sur le cours au jour du décès, pour lui faire payer les 20 % de frais. Il ne reste plus rien ou presque des exploits boursiers de son mari avec CGG, mais il est trop tard pour vendre, se dit-elle.
Mi 2015, les formalités sont terminées. Notre veuve* s’intéresse à la Bourse. On lui conseille d’assister à l’Assemblée de CGG. En janvier 2016, le DG du groupe y présente, les perspectives du parapétrolier sous un jour qu’elle trouve attrayant. La fin de 2015 a été moins pire que prévue, dit-il, mais il faut alléger l’endettement. Il propose à ses actionnaires d’augmenter le capital pour l’aider à passer ce difficile moment. Jean-Georges Malcor fixe la barre haut : il veut 350 millions d’euros, sur la base d’un cours ajusté à 21,12 €. Actionnaires de CGG, la banque publique BPI France et de l’Institut français du pétrole énergies nouvelles, les deux bras armés de l’Etat annoncent qu’ils souscriront, de même que le client Total.
Notre héritière est rassurée, dans les jours qui suivent, elle souscrit elle aussi, à de nouvelles actions. « Moyenner à la baisse » c’est le meilleur moyen de gagner en Bourse, lui dit-on.
Mais notre veuve voit très vite ses espoirs s’effriter, l’action CGG ne fait que chuter. Lorsque je l’ai rencontré à l’AG, l’action CGG valait 3,91 €. Le piteux PDG sollicitait à nouveau ses actionnaires et proposait une restructuration financière. Les ratios n’étaient pas bon, l’insolvabilité semblait inéluctable, mais la société continuait à s’activer, le fonds de commerce était préservé, rassurait-on. L’heure était venue de se mettre autour de la table, l’Etat au capital avait dicté ses conditions. Les vautours avaient débarqué. Ces créanciers peu scrupuleux, obtinrent du ventre mou des actionnaires ( dont l’Etat) qu’on leur remis des actions en échange de leur dette. Comme ça ne suffisait pas, le parapétrolier CGG pour poursuivre son activité, émettrait de nouveaux emprunts, fort tarifés. Les minoritaires quant à eux, seraient massivement dilués.
Mme de Carpentras était d’humeur joueuse ce jour là. Elle m’interrogea : devait-elle souscrire à cette nouvelle augmentation de capital ? C’était une affaire n’est-ce pas ? Un bon prix : 1,56 € par action quand le cours est à 3,80 € ? Ce n’était pas ainsi qu’il fallait calculer. Il ne restait plus grand chose du gâteau CGG, et elle allait devoir le partager avec de nombreux créanciers, qui n’apporteraient pas un sous.
J’ignore si la veuve compris, elle se demanda plutôt ce qu’aurait fait son mari.
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(*) Nous avons bel et bien rencontré une veuve à qui il est arrivé ce type de mésaventure fiscale et financière.